Paul DUHEM
Paul est né le 27 juillet 1919 à Blandain dans la région du Tournaisis et est décédé en 1999 à Ellignies-Sainte-Anne.
En élève appliqué, se rappelant ce qu’il avait appris à l’école, il commença ses premiers dessins en délimitant un cadre autour de sa feuille. Ensuite, il dessinait le cartouche dans le coin supérieur gauche où il inscrivait son nom et prénom. Ce n’est donc pas une signature qui finalise le travail, mais qui l’entame. Il était toujours très attentif à employer un bic bleu ou mieux encore, le style plume bleu.
S’il employait les feuilles de l’atelier, il les recoupait parfois, non pas avec des ciseaux, mais avec son couteau ; ce qui donne un aspect arraché à la feuille. Pour ses crayons, il n’avait pas besoin de taille-crayons, son couteau lui suffisait amplement pour réaliser une belle pointe. Ensuite, travaillant jusqu’à l’usure totale de la mine, il lui arrivait parfois de graver sa feuille avec le bois du crayon.
Il utilisait ses pinceaux jusqu’au bout. Jamais il ne les nettoyait. Il n’employait jamais de palette, mettant sa couleur dans une boîte à sardines. Lorsqu’il choisissait une couleur, il mettait tout le contenu du tube dans la boîte. Il travaillait donc par série. Lorsque la boîte se vidait, les différentes couleurs se mélangeaient, ses pinceaux sales y aidant. Il entretenait un merveilleux rapport avec la peinture à l’huile et le papier. Le papier absorbe le liant de la peinture. Paul avait senti cela. Suivant la dilution de la peinture, il permettait plus ou moins à la trace du pinceau d’apparaître. Il jouait avec cela. Il utilisait, sur le même dessin, différents matériaux : la peinture à l’huile, le bic, le marqueur, le crayon de couleurs, le pastel gras ou à l’huile.
Paul Duhem a eu dans sa production deux thèmes essentiels et deux thèmes secondaires. Ses deux thèmes secondaires étaient les moulins et les oiseaux qu’il a principalement traités pendant quelques mois en 1995. Ses deux thèmes principaux étaient les maisons et les portraits. La maison est symbolisée par la porte. Celle-ci est coiffée d’une toiture pointue, arrondie ou carrée, ornée souvent d’une lucarne. La porte ou la maison est rectangulaire, carrée ou très allongée et étroite, elle est aussi aménagée d’une fenêtre qui est parfois divisée en deux. Ces surfaces vitrées ne sont pas peintes. Malgré l’absence de rideaux, on ne voit pas l’habitant de ce lieu. (*)
Avant sa mort, Paul Duhem a rédigé un testament dans lequel il a fait don de l’ensemble de ses œuvres au Centre La Pommeraie. Une partie de ce patrimoine artistique est aujourd’hui conservé par la Fondation qui porte son nom. Paul Duhem est représenté dans de très nombreuses collections privées et publiques prestigieuses telles que le Musée des Beaux-Arts de Tournai (BE), la collection de la Province de Hainaut (BE), Art & Marges Musée à Bruxelles (BE), le Madmusée à Liège (BE), le Musée Docteur Guislain à Gand (BE), le Lille Métropole Musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut (LaM) à Villeneuve-d’Ascq (F), La Fabuloserie à Dicy (F), le Musée de la Création Franche à Bègles (F), la Collection de l’Art Brut à Lausanne (CH), le National Museum of Ireland à Dublin (IRL), le Museum of Outsider Art à Moscou (RU),…
(*) Bruno Gérard, 25 artistes du Centre La Pommeraie, Ed. Centre La Pommeraie, Ellginies-Sainte-Anne, 2000
D’abord, il ne faut pas s’y tromper : nous avons affaire à un peintre. La couleur est traitée et vagabonde dans l’escalier chromatique, sans aucun souci de convenances, mais avec une instinctive sûreté. Paul Duhem descend la gamme des tons dont aucune juxtaposition ne l’arrête, vers des peintures monochromes restant cependant d’une parfaite lisibilité. Les formes perdues dans le fond, comme dans un jeu de miroirs qui ne reflètent plus qu’une sorte d’apparition mystérieuse née de la vision plus que du geste, s’effacent l’une l’autre pour attendre une sorte de fusion métaphysique. (…) Il possède une véritable intelligence de la peinture, une connivence avec les couleurs, servies par une liberté qui met à mal tous les principes picturaux (…).
Gérard Sendrey, cofondateur et premier conservateur du Musée de la Création Franche à Bègles
(Gérard Sendrey, « Paul Duhem : les résurgences de l’essentiel », in : Appel Group, Ed. Centre La Pommeraie, Ellginies-Sainte-Anne, 1997)
Il arrive à l’atelier chargé de ses outils, qu’il pose sur son terrain, prêts à l’emploi. Au début, il cherchait encore le plus adéquat : la tasse à café servait au tracé des têtes, les formes géométriques, trouant la latte, se retrouvaient en frise sous un buste, il y avait l’équerre et le rapporteur, le décapsuleur aussi.
Françoise Henrion, fondatrice et responsable de la galerie Art en Marge, devenue Art et Marges Museum, à Bruxelles
(Françoise Henrion, « Autour de l’œuvre de Paul Duhem », in : Paul Duhem, Ed. Centre La Pommeraie, Ellginies-Sainte-Anne, 1999)
Paul Duhem nous apparaît comme ce jeune poète, encore une fois réincarné, encore une fois libéré de la pesanteur grégaire, pour produire enfin l’œuvre essentielle de sa vie.
Gérard Sendrey, cofondateur et premier conservateur du Musée de la Création Franche à Bègles
(Gérard Sendrey, « Un jeune poète », in : Paul Duhem, Ed. Centre La Pommeraie, Elliginies-Sainte-Anne, 1999)
L’humanité (…) est apparue [à Paul Duhem] comme une espèce ennemie, et chaque visage comme une porte verrouillée – ce sont ses deux thèmes exclusifs, et sous le signe de l’exclusion : des physionomies hostiles et des portails infranchissables, qui s’invoquent mutuellement comme des métaphores carcérales. La seule ressource de Duhem contre cette fermeture répétitive et universelle a été de l’exorciser par le dessin, de la décliner infatigablement dans tous les registres et dans toutes les couleurs, d’en réitérer, varier et combiner les éléments jusqu’à la constituer en un véritable langage.
Michel Thévoz, cofondateur et premier directeur de la Collection de l’Art Brut à Lausanne
(in : Paul Duhem Rétrospective, Ed. Art en Marge (Art et Marges Museum), Bruxelles, 2004)
On peut désormais croire à un autoportrait délibéré, sans doute ironique de par sa laideur caricaturale, son aspect grotesque à la Bruegel. (…) La porte [pourrait être considérée] comme l’équivalent exact de l’autoportrait, dans la mesure où une maison imaginée ou représentée peut fonctionner comme un symbole du moi, servant à confirmer une identité autrement fluide et fragile. (…) Il faut patienter pour qu’une porte s’ouvre devant nous, de la même manière qu’un visage nouveau s’ouvre et expose une personnalité, une présence. Certes, l’accès à pareille révélation reste virtuel chez Duhem, mais il suffit de se pencher une minute devant ses dessins hypnotisant pour éprouver une sensation sournoise. (…) Elle tient de la panique devant l’inconnu (un monstre pourrait nous guetter de l’autre côté du seuil). Mais elle tient aussi du soulagement, de la paix intime (on compte sur la sortie en plein air, la fin du renfermé).
Roger Cardinal, historien d’art anglais et inventeur du terme « outsider art » en tant que traduction du terme « art brut » créé par Jean Dubuffet
(Roger Cardinal, « Portraits, portes : les séries de Paul Duhem », in : Portraits de face, Art et Marges Museum, Bruxelles, 2011)
Crois-bien, cher Paul, que les sillons que tu as gravés dans ma mémoire sont imprimés à tout jamais.
Bruno Gérard, responsable de l’atelier dessin et peinture du Centre La Pommeraie
(in : Paul Duhem Rétrospective, Ed. Art en Marge (Art et Marges Museum), Bruxelles, 2004)
Paul est probablement la personne, l’artiste qui m’a le plus marqué professionnellement. Tel un météore il a traversé ma vie le temps de la marquer à tout jamais. Il avait déjà 70 ans lorsqu’il a réalisé son premier dessin, la force de celui-ci m’a ému et j’ai su, tout de suite, que je venais de rencontrer un être exceptionnel. Beaucoup d’artistes ont du talent, lui c’est autre chose, il pouvait se balader sur des chemins que peu d’artistes découvrent, tout en gardant une innocence désarmante. Après sa mort nous n’avons pas voulu entendre les sirènes de l’argent et notre seul objectif fut que Paul, alors qu’il avait été rejeté toute sa vie, puisse vivre dans toutes les maisons (…).
Bruno Gérard, responsable de l’atelier dessin et peinture du Centre La Pommeraie
(Bruno Gérard, « Paul Duhem », in : Débridé(e)s, Ed. Centre La Pommeraie, Ellignies-Sainte-Anne, 2008 – Prix Fondation Désiré Jaumain)
C’est véritablement dans la répétition que Paul Duhem est maître. Toujours la même chose, chaque fois différent. Chaque tableau est autonome, mais fait partie des autres. Les émotions qu’évoquent les couleurs, poussent le spectateur à regarder de plus près.
Patrick Allegaert, collaborateur scientifique au Musée Dr. Guislain à Gand
(Patrick Allegaert, in : Regards sur la collection, Musée de la Création Franche, Bègles, 2002)
Les Artistes
Michel BEAUTHIER
Jean-Jacques BONNIER
Dominique BOTTEMANNE
Anne BOUCHER
Maurice BRUNSWICK
Danièle CARON
Georges CAUCHY
Jean-Yves CHABOT
Michel DAVE
François DEFONTAINE
Serge DELAUNAY
André DELVIGNE
Niels DIEU
Daniel DOUFFET
Jean-Pierre DRILA
René DUBOIS
Georges DUESBERG
Paul DUHEM
Vincent FENEYROU
Ludivine FLIPS
Patrick FOURMEAU
Christian GAUTHIER
Irène GÉRARD
Jean-Pol GODART
Jean-Luc GODZ
Chantal GONTARCZYK
Martha GRÜNENWALDT
Oscar HAUS
Christelle HAWKALUK
Jean-Marie HEYLIGEN
Hugues JOLY
Isabelle LAURE
Alexis LIPPSTREU
Pascal MASQUELIÈRE
Jean-Pascal PÊCHEUX
François PEETERS
Jean POL
Louis POULAIN
Patrick SCHUMMER
Thibaut SEIGNEUR
Julien TAMA
Jacques TROVIC
Annie VAIRON
Louis VAN BAELENS
Olivier VAN EETVELDE
Michel VAN PRAET
Lionel VINCHE
Gérard WARGNIER
Jean-Michel WUILBEAUX