Martha GRÜNENWALDT

1910 Hamme-Mille (BE) – 2008 Mouscron (BE)

Photo © Raymond Saublains, 1992

Elle était septuagénaire déjà lorsque l’idée lui vint, subitement, de s’accaparer des crayons à sa portée pour imager de fleurs et de visages fleuris, de maisons aussi, les bouts de papier qui traînaient autour d’elle. Au lendemain d’une rude vie de domestique, la vieille dame se souvenait soudain qu’elle était née d’un père musicien ambulant et que, plus tard, mariée à un violoniste, elle s’éprit, elle aussi, d’un instrument qui l’aura enchantée autant qu’il lui aura permis d’engranger quelques sous en jouant dans les rues. Jusqu’à ce que les affres de l’existence la séparent de la musique des jours.

Désormais, elle dessine et peint à l’aquarelle. Elle se remémore inlassablement ses rêves de gamine qui aurait bien aimé une vie plus dorée. D’où sans doute ces visages mutins enclos en des floraisons riches et délicates, transparentes, odorantes quasi. Comme cela arrive souvent avec les artistes de la marge, avec les illuminés des sentiers inédits, Grünenwaldt aime remplir ses feuillets de lignes et de couleurs, presque jusqu’à plus soif.

Elle n’a pas peur cependant d’innover souvent au niveau des couleurs retenues, et ses florilèges graphiques adoptent volontiers des allures de guirlandes chatoyantes, au travers desquelles percerait un ou plusieurs regards câlins, parfois un peu tristes. Généralement enlevés et dynamiques, ses tableaux – car c’est bien de cela qu’il s’agit – s’apparentent à des mosaïques, à une foule de petits détails ajustés avec la science innée de la fresque habilement composée. C’est charmant, frais, constellé de points de couleur, de `grains de beauté´.

(Roger Pierre Turine, « Les jolis visages de Martha Grünenwaldt » (extrait), in : LaLibre.be, 26 novembre 2002)

Sa première exposition personnelle a été organisée à Mouscron par Art en Marge en 1987.

Ses œuvres sont présentes dans de nombreuses collections privées et publiques en Belgique, en France, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Suisse, en Angleterre, en Irlande,aux Etats-Unis et même au Japon.
C’est dans un souci de conservation et de protection de ses oeuvres que sa fille Josine, en 2017, a fait un don d’environ 80 dessins à la Fondation Paul Duhem.

Portrait vidéo (Notélé) 

Elle était de plus en plus joyeuse et boulimique dans ses envies d’entreprendre. Elle traçait des schémas de visages qu’elle laissait de côté pour les achever plus tard. Elle nous prenait tous les papiers qui restaient – anciennes affiches – papiers légèrement tachés qui l’inspiraient toujours plus que le papier dessin qui était acheté. Elle enlevait les crayons de couleur de nos enfants. 
(Josine Marchal, « Martha Grünenwaldt… c’est ma mère », in : Martha Grünenwaldt, Edition Oeil-art, Rives, 2010)

 

Au verso d’affiches ou de papiers peints, elle dessine un univers coloré dont la femme semble être le point centrifuge. Autour et en bord du visage apparaissent des oiseaux, un violoniste, des motifs végétaux ou encore une architecture. Ces motifs ont, au fil du temps, gagné du terrain sur les portraits pour aboutir dans certains cas à un véritable millefiore où se couche l’invisibilité de Martha.
(Arnaud Matagne, « Martha Grünenwaldt », in :  Art en Marge. Collection, Edition Art en Marge, Bruxelles, 2003)

 

Les regards des femmes maquillées, à la bouche plutôt crispée qui osent même parfois montrer les dents sont à la fois un reflet d’une réalité et d’une idéalisation. Martha accordait, à l’instar de Madge Gill, une attention particulière aux visages de femmes, sorte de leitmotiv inlassable de son inspiration. 
(Carine Fol, « Braver le temps », in : Martha Grünenwaldt, Edition Oeil-art, Rives, 2010)

 

Ce que laissent entrevoir, à qui sait les regarder, les ouvrages de Martha Grünenwaldt, c’est la complexité du trajet de la main qui les génère, la traversée aventureuse de la feuille de papier dont elle prend le risque, la mécanique de l’auto-engendrement des figures, la raison graphique qui les déploie.
(Alain Bouillet, « Le cœur à l’ouvrage », in : Martha Grünenwaldt, Edition Oeil-art, Rives, 2010)